Google Ads et ses 4 batailles (Décryptage Google Marketing Live Dublin 2024)
#17 Les brutes acquiz by Coudac
La semaine dernière, Coudac était invité par Google à l’occasion du Google Marketing Live 2024, le pendant publicitaire de Google I/O. Cette messe annuelle permet à la firme californienne de faire passer des messages clefs à ses clients (les annonceurs et leurs agences) via des annonces de nouveaux produits ou fonctionnalités publicitaires.
Un œil distrait vous dirait que ça n’a parlé que d’IA.
C’est vrai.
Mais derrière cette façade, les quelque trente nouveautés annoncées révèlent surtout les 4 grands défis rencontrés par le géant publicitaire :
La protection son monopole search
L’élargissement de sa couverture sur les nouvelles façon de chercher en ligne
La défense de son business model pay per click
La vampirisation des parts de voix publicitaires à Meta & TikTok sur les objectifs publicitaires « haut de funnel »
C’est parti
Un monopole en danger
« Curiosity is endless » Philipp Schindler, Chief Business Officer.
Chaque mois, 15% des requêtes sont tapées dans Google pour la première fois. Pour continuer à les capter, le moteur de recherche doit s’assurer de fournir la meilleure réponse possible. Sa façon historique de remplir cette mission, c’était de vous proposer un site internet qui contenait la réponse.
Mais ce modèle atteint ses limites sur certaines catégories de recherches.
Par exemple, parmi les utilisateurs qui recherchent « Est-ce que c’est grave que je crache du sang ? » une grande partie ne cherchent pas un article de santé (qui leur explique en prime qu’ils ont la peste), ils veulent savoir s’ils doivent aller aux urgences.
Bref, ils veulent la réponse, vite, ce qu’une requête à ChatGPT aurait eu des chances de leur donner.
Ce n’est qu’un exemple de jeu auquel Google n’est pas toujours le meilleur. Ce qui explique pourquoi ils ont pris très au sérieux la menace que les agents conversationnels font peser eux : le risque de vampiriser des requêtes auxquelles Google ne donnerait pas la réponse la plus pertinente.
En parallèle, les chiffres indiquent que l’on sort progressivement de l’ère de la recherche courte par mot clefs : les requêtes à +5 mots grossissent 50% plus vite que les requêtes courtes. Fini les « Restaurant Italien Versailles », certains utilisateurs pensent désormais qu’une requête plus complète aura des chances d’être comprise. Des aventuriers s’essayent donc parfois à « Restaurant italien pas cher avec une terrasse et des pasta alla vongole au menu », avec plus ou moins de succès pour l’instant.
La réponse la plus pertinente à cette question n’est probablement pas facilement accessible sur un site internet, sauf pour une IA.
Les aperçus IA de Gemini, toujours pas disponibles en France, viennent donner une réponse pertinente à ces requêtes qui se seraient autrement enfuies vers un interlocuteur digital plus intelligent.
Ils permettent de se positionner sur les réponses aux requêtes complexes, celles qui nécessitaient auparavant de visiter plusieurs sites, ex : « Trouve-moi le meilleur parcours touristique à Dublin, avec un marchand de glace et un cinéma qui diffuse un film pour enfant à 18h. ». Compliqué, même pour un local.
En bref, une IA-ttaque sur le search appelle une IA-défense qui revient pour Google à ouvrir son catalogue de produit à Gemini.
Mais ce n’est pas la seule menace qui pèse sur son monopole.
Le nouveau search
Ces dernières années, de nouvelles façons de chercher sur internet se développent, sans inclure Google dans leurs plans.
64 % de la génération Z et 49 % des millenials se tournent par exemple vers TikTok comme outil de recherche (source). 10% des GenZiers disent même préférer TikTok aux autres moteurs de recherches.
Le Search a une acception de plus en plus large. L’enjeu pour Google est d’utiliser Gemini pour devenir pertinent sur ces nouveaux cas d’usages.
Google Lens est un pas dans ce sens (12 milliards de recherches par mois sont faites à partir de photo).
C’est aussi sûrement la raison pour laquelle ils annoncent lors de cette conférence vouloir se positionner sur le « search beyond answers ». En gros, toutes les requêtes inspirationnelles où l’utilisateur cherche des idées plus que des réponses, hello Pinterest.
Google n’est pas juste menacé par les agents IA mais aussi par le changement des comportements de recherche en ligne, porté entre autre par l’explosion des réseaux sociaux.
Mais ce qu’il y a d’unique dans cette bataille pour les requêtes c’est que pour la gagner, Google semble devoir se vaincre lui-même.
Ne pas tuer la vache à lait
Les aperçus IA sont d’abord une nécessité défensive pour protéger la matière première du business model Google (les requêtes) mais ils mettent en même temps en danger l’autre côté de leur équation : les annonceurs.
En augmentant la quantité de réponses IA-generated, Google réduit à terme le nombre d’emplacements publicitaires payants pour les annonceurs (vous savez ces petits clics qui leur rapportent 237 milliards par an).
Google est pris dans un étau.
Le choix est cornélien : mourir par assèchement des recherches, ou se disrupter soi-même sans avoir aucune idée de comment monétiser cette attention fraîchement gagnée.
En vérité, des idées pour gagner de l’argent, ils en ont sûrement déjà. Peut-être même qu’il ne faudra pas chercher bien loin : Google a révélé que les annonceurs seraient bientôt en mesure de pouvoir diffuser leurs annonces Search et Shopping dans les aperçus IA.
Reste à savoir dans quel mesure ce nouvel inventaire publicitaire viendra cannibaliser l’ancien.
On ne connaît pas non plus encore l’équation économique derrière ces nouvelles requêtes payantes bien qu’on l’imagine plus serrée, voir inrésolvable pour le moment, étant donné le coût actuel pour générer une réponse IA (en moyenne 10x supérieur à celui d’une réponse classique).
Autant de sujets qui rendent incertain l’avenir de la vache à lait du search et qui expliquent sûrement pourquoi Google cherche à étendre ses revenus publicitaires en dehors de ses limitations naturelles (le nombre de recherches).
Mais qui sont donc les acteurs publicitaires qui arrivent à générer des milliards sans être capé de la sorte ?
Ah oui, les réseaux sociaux.
Voler des parts de voix
Google ne peut pas monétiser des requêtes qui n’existent pas. Ce qui veut dire que beaucoup d’annonceurs innovants ne peuvent pas s’appuyer sur des résultats de recherche pour capter des nouveaux clients, et donc donner du revenu à au géant californien.
Par exemple, si personne ne recherche « T shirt en matériau recyclé made in France » , un jeune annonceur sera obligé d’enchérir sur des requêtes plus larges (ex : « t-shirt »), plus concurrentielles et donc moins rentables. En d’autre mots, investir moins, ou pas du tout.
Mais c’est n’est pas juste le problème des “petits” annonceurs. Beaucoup d’entreprises choisissent de donner leur budget publicitaire à des régies qui ont le potentiel de les faire découvrir à leurs prospects, la plus populaire d’entre elle : Meta (134 millards de $ de revenus pub en 2023). Son algorithme utilise les données collectées sur ses utilisateurs pour permettre aux annonceurs d’être affiché auprès de personnes susceptibles d’acheter, qu’ils aient manifesté une intention de recherche ou pas.
Ce sont des sommes publicitaires colossales qui passent sous le nez de Google, pour aller se loger sur Instagram, Facebook, parfois TikTok.
Ce marché publicitaire du « push » leur fait donc de l’oeil, d’autant plus qu’ils ont sous la main une plateforme qui s’y prête très bien : Youtube, et dont l’inventaire est sous-exploité par les annonceurs.
Ceci permet de comprendre pourquoi Google a tout intérêt à ce que les produits publicitaires deviennent des « black box ». Avec Performance Max, Google demande à ce que vous lui déléguiez la décision de choisir où diffuser vos publicités. En échange il s’engage à vous donner la « meilleure performance possible », qu’elle vienne du search, shopping, Youtube, display etc.
Il peut donc écouler son inventaire publicitaire sans avoir à vous convaincre directement, la performance étant censée parler d’elle même.
Ainsi, beaucoup des fonctionnalités annoncées lors du GML sont dirigées vers la levée des frictions à l’utilisation des Pmax auxquelles les annonceurs reprochent souvent l’opacité. On pourra par exemple bientôt obtenir un reporting de performance par asset créative, chose qui était impossible jusqu’à aujourd’hui. Une formule simplifiée a même été créée : le « Power Pair » (combinaison de Pmax et du search en requêtes larges), sûrement inspirée du succès du “Power Five” de Meta il y a quelques années.
Mais ce n’est pas sur le bas de funnel que la bataille se joue.
L’enjeu pour Google est de faire acheter son inventaire Youtube pour des objectifs de considération. C’est là que se situent les gros des budgets qu’ils n’arrivent pas à capter. Pour ça, la méthode est la même : créer un produit publicitaire tout en un.
Here comes : Demand Gen.
Le nom est sans équivoque : « générer de la demande ». Dans un soucis de clarté on aurait pu le compléter par « que nous n’avons pas sur search et shopping ». Il permet aux annonceurs de diffuser leurs pubs sur l’ensemble de la suite Google (lire entre les lignes : Youtube) sur des objectifs de considération, renforçant ainsi sa faiblesse en milieu de funnel.
Ceci nous mène à la raison pour laquelle nous avons été la seule agence française reçue par Stephanie Davis, VP Customer Solutions EMEA. (Vous ne pourrez apprécier que mon associé
sur cette photo, j’ai du filer prendre mon avion de retour).Coudac est né d’un ADN Social. L’objet de la rencontre était pour Google d’en apprendre plus sur les obstacles qui se dressent entre les annonceurs et Demand Gen.
Google a compris que les agences Search n’ont pas l’ADN créatif qui leur permettra de vendre et opérer facilement Demand Gen dont le succès repose avant tout sur la qualité des éléments créatifs que les annonceurs lui fournissent. Pour diffuser sur tous les emplacements il faut savoir faire des pub pré-roll Youtube, des shorts, des miniatures etc.
Bref du taff d’artiste.
Côté annonceur, ça ressemble beaucoup au genre d’instant dont on se souviendra dans 5 ans comme le moment ou Demand Gen était sous exploité. Ça semble être l’un des plus gros mouvement de plaques tectoniques de l’adtech de ces dernières années et une bataille dont la victoire fera aborder à Google plus sereinement la disruption de son modèle en search.
En résumé Google sortira vainqueur s’il gagne les 4 guerres qu’il doit livrer. A savoir :
Utiliser son IA pour faire grossir le nombre de requêtes captées
Concurrencer TikTok, Pinterest & friends sur leurs requêtes spécifiques
Trouver une formule de monétisation viable pour la SGE (Search Generative Experience)
Rediriger le budget Meta et TikTok des annonceurs vers Demand Gen
Voilà les amis, c’est tout pour cette fois !
Merci à Manuel pour l’invitation,
, CEOPS : Coudac aide les annonceurs à exploiter ce genre de tendance pour acquérir plus de nouveaux clients. Au cas où ça t’intéresse on peut se réserver un appel de découverte juste ici :
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Merci pour cet analyse du plan de bataille de Google, a n'en pas douter la puissance de feu de Google leur permettra de créer des outils performants.
Je me demande si tu as une idée des moyens qu'ils pourraient employer pour faire revenir les brebis égarées qui ont déjà pris l'habitude d'effectuer leurs recherches sur Tiktok ?
Cette partie de la population recherche spécifiquement une réponse au format vidéo, et à moins d'intégrer les YT Short aux résultats de recherche Google (bon courage aux UX Designer pour caser Gemini Shorts & les ads sur la même page) je ne vois pas comment!